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Pourquoi les insectes ne sont-ils toujours pas dans nos assiettes?

Ils sont présents au Salon de l’agriculture depuis 2018, mais dans notre alimentation, on les cherche encore!

– Il y a deux ans, les insectes faisaient leur entrée au célèbre Salon de l’Agriculture, via l’une des nombreuses start-up qui rêvent de faire fortune dans l’élevage et la vente de cette “alimentation de demain”. On pouvait presque croire qu’ils étaient déjà arrivés dans nos assiettes.

Pourtant, pour son édition 2020, pas de trace de cette nourriture au Salon de l’Agriculture, qui a ouvert ses portes ce samedi 22 février. Tout au plus trouve-t-on quelques grillons et sauterelles au rayon “gâteaux apéritifs” des supermarchés à l’heure actuelle.

Pourquoi cette nourriture n’arrive toujours pas à s’imposer en France? Si elle est vendue par beaucoup comme la solution idéale de l’alimentation de demain, il existe en réalité de nombreuses barrières et questions législatives, culturelles, médicales ou encore environnementales avant d’imaginer voir des insectes remplir nos assiettes.

L’alimentation représente 26% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde. L’usage des terres agricoles est un des principaux facteurs de la perte de biodiversité. Face à ce double défi, il est nécessaire de changer notre façon de manger pour changer l’agriculture. C’est pourquoi Le HuffPost a choisi de publier, à l’occasion du Salon de l’agriculture, un dossier spécial consacré à notre alimentation. L’intégralité du dossier sera publiée d’ici au 1er mars.

Avant toute chose, il est aujourd’hui interdit de vendre des insectes pour la consommation humaine. Quid des grillons que vous voyez au rayon apéro du supermarché? Jean-Michel Chardigny, directeur de recherche à l’INRAE, explique au HuffPost que si les ventes restent illégales, les autorités ferment les yeux au vu des faibles quantités.

La raison de cette interdiction trouve son origine dans la loi européenne “Novel Food”. Cette dernière interdit la mise sur le marché d’aliments qui n’étaient pas consommés de manière significative par l’homme avant le 15 mai 1997. Les insectes, eux, sont arrivés bien plus tard en Europe.

Évidemment, la France pourrait aller plus loin. Certains pays, comme la Belgique, avaient temporairement testé la commercialisation de certaines espèces d’insectes. Mais celle-ci a pris fin, le 1er janvier 2019. Dans les Pays-Bas ou en République tchèque, la commercialisation est également autorisée.

Les insectes, une nourriture d’avenir

S’ils sont interdits dans nos assiettes, les insectes sont en revanche utilisés comme nourriture dans l’aquaculture. Ils font partie du régime alimentaire de la plupart des poissons. Et d’après l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (la FAO), la farine d’insectes pourrait devenir de plus en plus utilisée.

Elle a deux avantages: elle est peu coûteuse et possède une forte valeur nutritionnelle. Jean-Michel Chardigny explique: “Les insectes ont une importante teneur en protéines et ces dernières semblent de bonnes qualités, même si on manque encore de données sur le sujet”. Ils sont également riches en oméga 3.

En résumé, les insectes sont des aliments efficaces. D’ailleurs, dans le reste du monde, 2,5 milliards de personnes en mangent. Alors, pourquoi ne pas changer la législation française?

Déjà, car même si la loi l’autorisait dans le futur, nous n’avons pas l’air prêts. Un sondage réalisé par YouGov pour Le HuffPost montre qu’environ 74% des Français sont contre l’idée de manger des insectes, même si l’on en ingurgite parfois sans le savoir, comme dans les fraises tagada auxquelles la cochenille donne cette couleur rouge. Moins de deux Français sur dix seraient d’accord pour en consommer.

D’ici 2050, on estime qu’il y aura 10 milliards de personnes sur la planète. En termes de nourriture, les aliments riches en protéines risquent de manquer. Jean-Michel Chardigny, détaille: “Les insectes ne seront pas la seule solution, mais ils pourront être un contributeur pour combler ce manque”.

Risques d’allergies

Même si ce rejet culturel venait à disparaître, les insectes ne sont évidemment pas parfaits. “Le risque allergique est majeur”, indique le chercheur. Les insectes appartiennent à la famille des arthropodes et partagent les mêmes allergènes. Si on est allergique aux crustacés, il y a de fortes chances de l’être aux insectes. Il existe aussi des risques physiques, microbiens ou chimiques, comme vous pouvez le voir dans la vidéo en haut de l’article.

Ils peuvent être, par exemple, porteurs de virus, microbes ou parasites. La présence de parties dures sur le corps des insectes comme la carapace ou les dards peut également être problématique, même si le danger est très faible.

Malgré ces défauts, les insectes pourraient tout de même avoir un rôle à jouer en Europe dans le futur, mais pas sous leur forme actuelle. Des entreprises réfléchissent déjà à une future production industrielle. Plutôt que des burgers d’insectes, comme on peut en trouver en Suisse, nous pourrions en ingurgiter sans trop nous en rendre compte. “En France, je ne pense pas que beaucoup de personnes mangeront des insectes entiers, plutôt de la farine par exemple”, rapporte le chercheur.

Les insectes sont ce qu’ils mangent

Quitte à envisager la nourriture de demain, il faut que celle-ci soit respectueuse de l’environnement. Et ici, on est dans le flou. Actuellement, les insectes consommés par 2,5 milliards de personnes, notamment en Asie, Amérique du Sud et Afrique, sont récoltés, le plus souvent, directement dans la nature. En Europe, il faudrait les produire de manière industrielle dans des fermes. La taille de ces bestioles n’empêche pas de se poser des questions sur l’empreinte carbone et l’impact sur la biodiversité.

Sur le papier, élever des criquets sera moins polluant et moins consommateur en eau que l’élevage de bovins. Mais la réalité est plus complexe. “L’impact environnemental est encore très discuté, si l’on importe du soja d’Amérique du Sud, ce ne sera pas très bon” pointe Jean-Michel Chardigny. Les insectes sont ce qu’ils mangent et leurs bénéfices nutritionnels et environnementaux dépendent de comment nous les élèverons.

Source : Huffingtonpost.fr

 

 

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