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Stress : réduire l’anxiété en agissant sur le microbiote

De plus en plus d’études suggèrent un lien entre le microbiote intestinal et l’humeur, d’où l’idée d’utiliser des probiotiques ou un changement alimentaire pour agir sur le cerveau. Une méta-analyse récente suggère qu’une action sur la flore intestinale peut soulager l’anxiété.

Le stress et certaines pathologies psychiatriques provoquent de l’anxiété chez beaucoup d’entre nous. Or, le microbiote intestinal influence le fonctionnement du cerveau par ce qu’on appelle souvent « l’axe intestin-cerveau ». C’est pourquoi on peut se demander si des probiotiques, qui sont de « bonnes » bactéries agissant sur notre microbiote, pourraient aider à réduire l’anxiété.

Pour répondre à cette question, des chercheurs de l’université Jiao-tong, à Shanghai, ont passé en revue 21 études portant sur environ 1.500 personnes. Quatorze études évaluaient l’effet de probiotiques : sept études testaient une seule souche probiotique, deux études concernaient deux souches et cinq études au moins trois souches. Les sept études restantes sur les 21 concernaient d’autres interventions comme un régime susceptible d’agir sur la flore intestinale, par exemple une alimentation pauvre en FODMAP (des glucides fermentescibles).

Les probiotiques seuls moins efficaces que les interventions alimentaires

D’après les résultats parus dans la revue General Psychiatry, 11 études sur 21, soit un peu plus de la moitié (52 %) ont trouvé que l’intervention sur le microbiote soulageait l’anxiété. Sur les 14 études qui avaient utilisé des probiotiques, seulement un tiers environ (36 %) ont trouvé une efficacité, alors que six études sur les sept qui ont utilisé d’autres interventions étaient efficaces. En fait, les probiotiques semblaient plus bénéfiques s’ils étaient associés à d’autres types d’interventions.

Un changement de régime alimentaire aurait donc un impact plus important sur le microbiote que la prise d’un complément probiotique. « Nous trouvons que plus de la moitié des études incluses ont montré qu’il était positif de traiter les symptômes d’anxiété en régulant le microbiote intestinal », ont conclu les auteurs.

Outre leur rôle bien connu dans la digestion, les bactéries intestinales influencent aussi l’activité cérébrale et l’humeur. Des chercheurs irlandais proposent d’utiliser des probiotiques dans le traitement du stress et de la dépression. Ces « psychobiotiques » ouvrent la voie vers de toutes nouvelles méthodes de traitement des maladies comportementales.

Les milliards de microbes qui colonisent notre système digestif nous sont bénéfiques à plus d’un titre : ils nous aident à bien digérer, nous épaulent en cas d’infections alimentaires et influencent le développement de certaines maladies comme l’obésité, le diabète de type 2 et les allergies. Au cours d’un traitement antibiotique, nos bactéries intestinales sont affaiblies et il n’est pas rare de souffrir de troubles digestifs. Pour lutter contre ce problème, des probiotiques sont souvent prescrits. Il s’agit en général de bactéries lactiques, hôtes naturels de l’intestin, qui ont des effets positifs sur la santé.

Le rôle de la flore intestinale ne s’arrête pas là. Des travaux de plus en plus nombreux suggèrent qu’elle influence également l’activité cérébrale et les comportements chez les animaux. Une étude de 2011 a par exemple révélé que les bactéries de la flore intestinale diminuaient l’anxiété et la dépression. Plus récemment, des chercheurs de l’University College Cork en Irlande ont montré qu’elles régulaient les taux de sérotonine et d’acide γ-aminobutyrique (Gaba), deux neurotransmetteurs intervenant dans le contrôle de l’humeur. Des souris stériles privées de ces microbes présentaient d’ailleurs des troubles de l’anxiété.

La dépression se caractérise par un profond désarroi et un manque de goût pour la vie. Les personnes qui en souffrent sont en général suivies par un médecin ou un psychologue. Elles peuvent également prendre un traitement d’antidépresseurs. Pourra-t-on un jour échanger ces médicaments par des probiotiques ? La question est posée en tout cas…© Toni Birrer, Flickr, cc by sa 2.0

Lors d’une situation de stress ou d’un épisode dépressif, les concentrations de sérotonine et de Gaba baissent. La plupart des antidépresseurs améliore la sécrétion de ces molécules afin de rétablir les niveaux normaux et d’améliorer l’humeur des patients. L’équipe irlandaise s’est alors demandée si les microbes digestifs pouvaient remplacer les médicaments antidépresseurs, souvent associés à des effets secondaires déplaisants. En d’autres termes, pourrait-on atténuer les signes de la dépression grâce aux probiotiques ? Pour répondre à cette question, ils ont exploré la littérature scientifique des dernières années sur le sujet. Leur analyse, publiée dans la revue Biological Psychiatry, présente le concept de psychobiotiques, des probiotiques utilisés pour soigner les troubles d’ordre psychiatrique.

Une meilleure alimentation pour être moins déprimé

Leurs conclusions suggèrent que les probiotiques améliorent les troubles de l’humeur chez les animaux. Une étude montre par exemple que les souriceaux séparés de leurs mères surmontent mieux la situation si leur alimentation est complétée par certains probiotiques. Par leurs vertus anxiolytiques et antidépressives, ces microbes favorisent à la fois le comportement et la réponse immunitaire des rongeurs.

D’autres recherches se sont intéressées aux effets des probiotiques sur les troubles dépressifs et le stress chez l’Homme. Jusqu’ici, les psychobiotiques ont été principalement étudiés chez les patients atteints du syndrome du côlon irritable, une maladie intestinale souvent associée à des problèmes d’humeur. Les résultats suggèrent un effet positif de plusieurs micro-organismes, notamment Bifidobacterium infantis, dans le traitement de ces troubles. Selon les auteurs, ces bénéfices seraient dus à leur action anti-inflammatoire ainsi qu’à leur capacité à réduire l’activité de l’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien, appelé plus communément axe du stress.

Ces résultats mettent en lumière l’influence de l’alimentation sur notre santé. En faisant attention à son hygiène de vie on pourrait limiter les risques de dépression, car le régime alimentaire influence la qualité de la flore intestinale. Cette analyse pose également la question de l’effet des antibiotiques sur notre comportement. Elle invite les médecins à être encore plus attentifs et à ne pas en prescrire abusivement.

Source : Science et Vie

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